Fragment : L'Étoile d'Azaroth

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Emblèmes

Azaroth
Gladys

Fragment

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L'Étoile d'Azaroth


La lumière était tamisée, dans la grande salle souterraine. Les brasiers, au loin, brûlaient bas, et le jeune fleuve de lave, tout près de sa source, jetait des ombres étranges sur les parois de pierre. Le seigneur d’Azaroth, dans son immense trône, parlait à Gladys, et sa voix emplissait la caverne comme un orage dans une bouteille.

« Je t’ai offert tout ce que je possédais, disait-il. Chaque pièce de mon palais, jusqu’à la plus somptueuse ; chaque acre de mon royaume, chaque vallée, chaque sommet. Je te donnerais mon trône d’onyx et ma couronne d’airain, si tu l’ordonnais.

– Je ne désire rien de ce que tu possèdes, seigneur, murmurait Gladys.

– Alors que veux-tu que je ne possède pas ? Des robes et des parures à faire pâlir d’envie tous les rois des abysses ? Des montagnes d’or et des fleuves de diamants ? Des chevaux de lumière et des navires qui voguent dans l’éther ? Nomme-le, tu l’auras.

– Je ne désire rien de ce que tes mains peuvent façonner, seigneur.

– Que veux-tu que j’accomplisse, alors ? Vaincre mille armées à moi seul ? Je le peux. Conquérir mille royaumes et déposer leurs couronnes à tes pieds ? Je le peux. Massacrer mille dragons et t’offrir leurs cœurs encore chauds ? Je le peux !

– Tu ne peux m’offrir aucun cœur que je désire, seigneur.

– Une lune et un soleil dans le ciel d’Azaroth… des bouquets d’étoiles par milliers… des planètes sans nombre qui dansent dans la nuit… »

Le seigneur avait quitté son trône. Il balbutiait, rampait, suppliait. Il voulait se faire plus petit que la petite Gladys, qui reculait.

« Non, seigneur, je ne désire rien de tout cela, et ce que tu attends en retour n’est pas une chose qui s’achète. »

Le seigneur se tut et se releva. Sa rage éclata et de toute sa hauteur, il tonna :

« Si aucun mot ne peut te fléchir, alors, des actes ! »

Il sortit de la salle du trône à grands pas, écartant les lourdes portes de pierre d’un geste plein de rage.

Nul ne revit le seigneur. Ses suivants racontèrent qu’il avait délaissé son armure de guerre et revêtu son manteau de nuit, puis avait disparu. Une longue période s’écoula. Le royaume était léthargique, comme assommé par un coup à ébranler les montagnes. Les démons priaient les dieux, et les dieux hésitaient. Décimé, Azaroth attendait.

Une minuscule étoile brillait dans la nuit noire, quand le seigneur revint. Il congédia ses suivants, s’enferma seul dans son palais, et ordonna qu’aucun démon n’ouvre les lourdes portes de pierre. Elles ne s’ouvrirent que pour Gladys, qui s’avança, furieuse, jusqu’au trône d’onyx.

« Je me moque de savoir dans quel ciel tu es allé dérober cette étoile, seigneur, et si ton peuple ne devait encore souffrir de ton absence, je t’enverrai immédiatement la remettre à sa place. Plût aux dieux que tu ne m’aies pas humiliée d’avantage en me ramenant un soleil ! À présent tu vas ouvrir ces portes et t’occuper de ton royaume, et aussi désolée que je sois pour toi, seigneur, ce n’est pas toi que j’aime. »

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