Fragment : Au Bout des Mondes

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Emblèmes

Gladys
Azaroth

Fragment

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Au Bout des Mondes


« Voilà.

J’ai traversé la mort. J’ai remonté le fleuve infernal jusqu’à sa source, jusqu’à ce monde cis au bord des mondes, et jusqu’au bord de ce monde. Je me suis assise, les jambes ballantes dans le vide, sur le rempart nord de sa cité. Sous mes pieds, les lointaines lueurs de la Création sont comme un tapis de diamants épars au fond d’un puits. Au-dessus de ma tête s’étendent les noires nuées d’Azaroth – la robe de Céleste. Et devant moi, l’horizon sans ligne, sans terre ni mer, sans astre, sans couchant ni levant, le vide infini.

Voilà.

Je suis allée aussi loin que j’ai pu ; jusqu’à ce que mes pieds nus n’aient plus de terre pour les porter. J’ai fait taire mon cœur et j’ai apporté sa dépouille silencieuse jusqu’au bord des mondes.

Je ne veux plus t’aimer. Je ne veux plus de ce sentiment qui me consume et ne laisse que des cendres. Je ne veux plus de ces mots qui m’enchaînent, qui me clouent, qui m’écrasent. Je ne veux plus aimer. Je ne peux plus. Je veux exister. Être autre chose que cette flamme sans corps, cette explosion permanente, cette écorchée vive. Je jette dans le vide ce cœur mort et ses souvenirs de toi. Puisse le néant avaler ma douleur. Puisse mon brasier s’éteindre et me laisser en cendres – en paix. Un jour, peut-être, verra de ces cendres naître autre chose. Une chose qui, peut-être, sera véritablement moi. Mais à présent, je ne veux plus exister. Je veux être vide et silencieuse ; froide et morte ; inerte et creuse.

Laissez-moi en paix.

Je ne veux plus.

Je ne peux plus. »

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